Portrait 2013 de la finance responsable au Québec, volet placement responsable
Alors que le placement consiste à placer des actifs sur des marchés financiers secondaires en vue d’un rendement, l’investissement et le financement direct dans les entreprises supposent une implication plus active dans l’exploitation de ces entreprises. Le placement sera qualifié de responsable si les décisions liées aux choix de placements et à leur gestion sont fondées sur des pré-occupations extrafinancières alors que les investissements et le financement direct le sont à travers leur mission même d’investissement qui s’inscrit dans le développement économique, social ou environnemental des territoires concernés.
L’innovation sémantique est un bon indicateur de l’évolution d’une nouvelle activité, marquée par son temps et par les spécificités culturelles de ses lieux d’émergence. Une profusion de concepts est utilisée pour décrire les pratiques de cette finance en émergence : certains parlent de fonds « éthiques », d’autres « d’investissements socialement responsables », voire « soutenables ». Même dans la langue anglaise, où le concept de « Socially Responsible Investment (SRI) » est véritablement dominant, on remarque cette diversité sémantique. Mais derrière ces variations, on trouve pourtant un même principe de base fondateur : la prise en compte de considérations éthiques, sociales et environnementales, au-delà des objectifs financiers traditionnels, dans les décisions d’investissement ou de placement. Dans notre démarche, nous avons préféré utiliser le concept de finance socialement responsable (FSR) à tous les autres, parce qu’il permet de distinguer les deux grands types de pratiques de ce mouvement : le placement (sur les marchés financiers) et l’investissement (l’intervention financière directe en entreprise).
Pour la troisième fois, des organisations québécoises ont joint leurs efforts pour produire un portrait de la finance socialement responsable au Québec. La première expérience, réalisée sous l’égide de l’Alliance de recherche Universités-Communautés sur l’économie sociale (ARUC-ÉS), avait été laborieuse, en s’échelonnant sur deux ans et demi (2004-2006). La deuxième expérience fut le résultat des efforts du nouveau Réseau de la finance solidaire et responsable (CAP Finance), de l’Institut Karl Polanyi d’économie politique de l’Université Concordia et de la Chaire d’éthique appliquée de l’Université de Sherbrooke. Cette mise à jour du portrait de la finance responsable, réalisée en 20102, avait été rendue possible grâce à une collaboration de Gilles L. Bourque, responsable du comité d’information de CAP Finance, Marguerite Mendell, directrice de l’Institut Karl Polanyi et vice-présidente de l’École des affaires publiques et communautaires de l’Université Concordia, et Allison Marchildon, professeure associée à la Chaire d’éthique appliquée de l’Université de Sherbrooke.
Pour le portrait 2013, nous retrouvons la collaboration de Gilles L. Bourque et Marguerite Mendell pour le compte de trois organisations : CAP Finance, l’Institut Polanyi et l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC). Ce portrait comporte, comme en 2006, deux grands volets : le placement et l’investissement responsables. Le présent rapport porte plus spécifiquement sur le volet du placement responsable, pour lequel l’équipe de l’IRÉC était responsable de la réalisation. Le rapport du volet investissement responsable (recouvrant les pratiques du capital de développement et de la finance solidaire) sera produit ultérieurement par l’équipe de CAP finance.
Pour conclure cette brève introduction, signalons que ce portrait 2013 du placement responsable est différent dans sa forme et son contenu à la récente étude3 produite par l’Observatoire ESG UQAM de la consommation responsable, qui propose un portrait du marché ISR québécois du point de vue des épargnants. Au contraire de cette étude, qui s’intéresse aux perceptions et aux attentes des Québécois, notre portrait vise plutôt à quantifier les actifs sous gestion au Québec par le moyen d’une enquête auprès des gestionnaires d’actif. Nos deux portraits sont très complémentaires.