CITOYENNETÉ URBAINE ET STRATÉGIES D’APPROPRIATION DE LA VILLE : EXPÉRIENCES INÉDITES DE JEUNES SANTIAGUINOS FACE À LA CULTURE NÉOLIBÉRALE

Notre recherche s’intéresse à la citoyenneté urbaine inédite de jeunes de la ville de Santiago (Santiaguinos) en tant que mode d’appropriation de la ville au sens d’une entité « coconstruite ». Cette nouvelle pratique de la citoyenneté est une réponse à la culture individualiste axée sur la concurrence et la performance imposée par la dictature de Pinochet et reconduite depuis la fin de celle-ci en 1990 par des politiques néolibérales appliquées par les gouvernements qui lui ont succédé. Un nouveau scénario se configurerait à Santiago en ce qui a trait aux destins et aspirations des jeunes, une resignification des interactions entre l’espace urbain et la citoyenneté. Comment les jeunes perçoivent-ils les réalités et les problèmes de la ville qu’ils habitent et façonnent? En quoi leurs savoirs, mobilisés dans des expressions citoyennes ancrées territorialement, leur permettent-ils d'assurer un protagonisme urbain effectif? Prenant en considération le discours et l’expérience de près d’une vingtaine de jeunes engagés dans leur communauté géographique d’appartenance, nous explorons la ville comme espace d’expression de nouvelles formes de citoyenneté allant au-delà du cadre institutionnel. Des entrevues semi-dirigées auprès de jeunes et d’informateurs-clés du milieu gouvernemental, académique et de la société civile, ainsi que l’observation du terrain ont été réalisées à Santiago entre le mois de mai et d’août 2014. Notre hypothèse principale soutient que différents types d’interactions sont nécessaires afin de consolider une citoyenneté urbaine active, durable et « transmissible » d’une génération à l’autre. Dans un contexte où la méfiance des jeunes envers les institutions et des conditions qui ne permettent que partiellement le développement des capacités réflexives, voire critiques, tout en générant une certaine homogénéisation des pratiques sociospatiales de la population, le mal-être social qui s’exprime dans l’espace public se veut articulé à des demandes des jeunes pour plus de pouvoir citoyen dans la ville. Le modèle théorique de Max Neef (1993), une matrice de sept besoins fondamentaux non hiérarchiques, à combler par des processus satisfacteurs synergiques, soutient l’analyse des résultats. Notre étude dévoile des vécus quotidiens en tension avec la ville ségréguée, des modes de participation mobilisant des principes de droits citoyens, des référentiels épistémiques modelés par différents types de savoirs. C’est en tentant de reconstituer la citoyenneté que la quête des jeunes prend forme, que l’exigence pour une émancipation sociospatiale se configure, lentement.

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