Le territoire québécois est en majeure partie composé d’une vaste périphérie nordique où abondent différentes ressources naturelles. Le processus d’occupation de cet espace a vu se succéder plusieurs phases au fil du temps, chacune s’inscrivant dans une conjoncture économique, sociale et politique qui lui était propre. En ce début de 21e siècle, l’économie mondiale est entrée dans un nouveau cycle économique généré par l’industrialisation et l’urbanisation du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud, communément désignés sous l’acronyme « BRICA ». Dans la foulée de ce cycle, le gouvernement du Québec a défendu une stratégie de mise en valeur des ressources censée favoriser la prospérité des communautés nordiques. Cette recherche vise à vérifier la vraisemblance de ce scénario en étudiant l’évolution de l’occupation du Nord aux 19e et 20e siècles.
Dans le cadre de cette étude, la réflexion s’est appuyée sur le postulat qui veut que le développement d’un territoire se manifeste par un progrès social, économique et infrastructurel qui se traduit naturellement par une croissance effective de la population. Afin d’observer l’évolution de cette occupation territoriale, le choix a été fait d’exploiter les données démographiques de 84 localités nordiques réparties entre le Saguenay–Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, l’Abitibi–Témiscamingue et le Nord-du-Québec de façon à produire des courbes qui illustrent leurs trajectoires d’occupation respectives. Cet exercice devait permettre d’illustrer la diversité des parcours territoriaux dans la périphérie nordique du Québec et de vérifier si l’évolution du mode d’occupation indiquait une tendance à l’intensification, à la stabilisation ou à l’érosion.
Le panorama réalisé suggère l’existence de sept profils types parmi lesquels ont été classées les 84 trajectoires. Cette typologie et la classification qu’elle autorise ont permis de mettre en lumière la complexité du développement territorial, de faire ressortir l’incidence des contextes territoriaux sur le développement des communautés nordiques et d’exposer les conséquences des transformations subies par le modèle d’occupation privilégié par les autorités sur la prospérité de ces communautés.
En définitive, cette étude démontre que le mode d’occupation territoriale préconisé par les décideurs s’est transformé au fil du temps et que la tendance semble tout au mieux pointer vers la stabilité démographique. Le portrait de l’évolution d’une majorité des localités du Nord sélectionnées n’atteste pas d’une croissance démographique et une forte proportion d’entre elles accuse même un déclin démographique, ce qui tend à démontrer que le mode d’occupation territorial dominant ne participe pas nécessairement à la prospérité des territoires nordiques.