Le trait le plus frappant de la géographie de l’activité économique est le fort degré de concentration spatiale, et ce dans la majorité des pays et à divers échelles géographiques. Michael Porter (1998, p.197) a introduit la notion de cluster qu’il définit comme étant « une concentration géogra-phique d’entreprises liées entre elles, de fournisseurs spécialisés, de presta-taires de services, de firmes d’industries connexes et d’institutions associées (universités, agences de normalisation ou organisations professionnelles, par exemple) dans un domaine particulier, qui s’affrontent et coopèrent ». Au cours des vingt dernières années, cette notion de cluster a connu un regain d’intérêt auprès des décideurs politiques, des agences de dévelop-pement et des universitaires. Plusieurs pays et agences de développement ont construit leur stratégie de développement industriel sur les modèles de pôles de compétitivité. Malgré quelques succès de leur implantation au Bré-sil, aux États-Unis, au Japon, en France, en Finlande et en Italie, plusieurs études s’interrogent sur l’efficacité coût-bénéfices de telles politiques. En effet, bien que contribuant à l’augmentation de la productivité, des salaires et de l’emploi, la concentration spatiale de l’activité économique entraine des coûts qui sont très souvent ignorés ex ante : la congestion, la rareté de l’espace, la criminalité, la pollution, etc. Il y’a donc très peu d’évidences empiriques sur l’impact des politiques de promotion des clusters au ni-veau macroéconomique (voir Duranton, 2011 ; Duranton, Martin, Mayer, and Mayneris, 2012).
Afin de mieux comprendre les causes et les implications des poli-tiques de promotion des clusters, il est important de bien mesurer l’am-pleur et le degré de concentration observé. Bien que cette question ait fait l’objet de nombreuses recherches, à ce jour, il n’existe pas d’indica-teur statistique idéal de mesure de la concentration spatiale de l’activité économique. Cette thèse propose trois chapitres qui utilisent des données micro-géographiques et les méthodes d’estimation paramétrique et non-paramétrique afin (i) de fournir un portrait complet de l’état, l’ampleur et la dynamique de la concentration spatiale de l’activité manufacturière au Canada ; (ii) de fournir des évidences empiriques qui permettent de mieux comprendre les déterminants de la concentration spatiale des industries et comment ces déterminants ont influencé les changements observés dans la concentration spatiale ; et (iii) de proposer une nouvelle approche non-paramétrique de mesure de la concentration spatiale de plusieurs indus-tries technologiquement liées.