L’ouverture croissante des marchés internationaux et l’évolution de la compétition mondiale poussent les entreprises manufacturières à chercher différentes solutions pour réduire leurs coûts et améliorer leur compétitivité. Parmi ces solutions, la sous-traitance d’une partie ou de la totalité de la production vers la Chine, où les coûts de main-d’œuvre sont relativement bas, est une stratégie que privilégient de plus en plus d’entreprises. Bien que celle-ci puisse procurer un avantage compétitif considérable, elle peut aussi être accompagnée de différentes difficultés telles la diminution de la qualité de la production, les dépassements des délais de livraison ou encore le règlement de coûts non prévus initialement.
Plusieurs entreprises qui ont opté pour cette stratégie n’ont pas connu les succès attendus comme l’ont démontré les résultats de quelques études. L’échec de ces stratégies et l’insatisfaction des dirigeants à leur égard peuvent être expliqués principalement par la méconnaissance ou la négligence des risques qui leur sont associés. En effet, les projets de sous-traitance internationale sont empreints de risques qui ne sont pas bien appréhendés des entreprises locales ou dont l’importance n’est pas suffisamment prise en compte. Cela justifie la pertinence d’une étude visant l’identification et l’analyse des risques associés aux projets de sous-traitance en Chine, l’examen de leur influence sur la réalisation des objectifs de l’entreprise et l’exploration des pratiques utilisées pour en réduire les conséquences négatives.
Afin de rencontrer ces objectifs de recherche, nous avons réalisé une étude de cas multiples impliquant sept entreprises manufacturières québécoises en s’appuyant principalement sur des entrevues semi-dirigées auprès de deux dirigeants par firme. Les témoignages recueillis ont confirmé que les projets de sous-traitance en Chine, étant plus complexes, présentent plusieurs difficultés que les entreprises québécoises ne rencontrent pas dans leur pays. Cette complexité est due notamment à la distance géographique séparant les deux régions, au contrôle réduit sur les opérations par les dirigeants québécois, à l’inexpérience, dans plusieurs cas, de ces derniers et de leurs employés dans la gestion de ce type de projets, et principalement aux différences existant entre les pays aux niveaux culturel et social, au niveau des pratiques d’affaires et au niveau de la perception de l’importance de certains paramètres tels la qualité. Tous ces facteurs sont générateurs de risques pour les entreprises manufacturières.
Notre étude a permis d’identifier plusieurs de ces risques, de les analyser et d’explorer les pratiques utilisées pour les gérer. L’analyse des entretiens montre notamment l’importance pour les dirigeants québécois de se familiariser avec les dimensions culturelles des Chinois et leurs façons de travailler, de communiquer souvent avec eux pour établir des liens qui vont au-delà des relations d’affaires et de trouver des moyens pour les inciter à fournir un service et des produits répondant aux standards de qualité des entreprises clientes. On retient principalement la nécessité de développer une certaine proximité pour favoriser la confiance et la collaboration, car cela peut empêcher l’occurrence de certains risques et faciliter le traitement d’autres.
La diversité des comportements des entreprises étudiées révèle également que les mêmes risques ne se présentent pas avec la même acuité chez toutes les entreprises et que, selon leur expérience, une certaine diversité de plans de réponse peut être déployée pour en réduire l’occurrence ou en contrôler les impacts. En bout de ligne, on constate une certaine satisfaction des dirigeants québécois de leurs décisions de sous-traiter une partie de leur production en Chine, car ils ont été aptes, dans le temps, à profiter de leur stratégie pour accroître leur compétitivité.
Par ailleurs, cette recherche a démontré la difficulté à identifier et évaluer les risques rencontrés par une entreprise à partir des expériences des répondants étant donné l’influence de leur perception et de leur profil sur leurs réponses. Cette observation suggère de confier un éventuel processus de gestion des risques à une équipe de gestionnaires diversifiée plutôt qu’à un seul individu dont la personnalité influencerait le processus et les décisions.