Les alliances entre caisses : tensions, enjeux et compromis. Le cas d'un centre financier aux entreprises Desjardins

La conjoncture socio-économique actuelle amène les institutions financières, banques et coopératives, à procéder à des changements importants si elles veulent conserver un avantage concurrentiel correspondant aux besoins de leur clientèle pour les premiers, et de leurs membres pour les seconds. Ce mémoire présente une stratégie d’alliance dans le secteur coopératif financier québécois. Nous avons analysé les logiques de coordination et la répartition du pouvoir au sein d’une alliance entre caisses regroupant leurs services financiers commerciaux dans un centre financier aux entreprises Desjardins (CFE). Le terme d’alliance est très peu abordé dans la littérature sur les coopératives. De plus, il existe peu d’expériences d’alliance menées dans le milieu coopératif. Plusieurs tensions pèsent sur ces alliances intercoopératives : entre les exigences de l’économie de marché et l’économie sociale, entre la centralisation de certains pouvoirs et l’autonomie des caisses, entre la structure d’entreprise et l’association ainsi qu’entre la sous-traitance et l’intégration. L’intérêt d’entreprendre cette recherche est ainsi motivé et orienté par la question de recherche suivante : comment les alliances entre caisses arrivent-elles à résoudre ou pas les tensions auxquelles elles sont exposées du fait de se réaliser en contexte coopératif ? L’étude de la coordination et du pouvoir nous a permis de mettre en relief les différents enjeux et compromis dans le fonctionnement de l’alliance entre caisses en fonction des quatre types de tensions. La confrontation des propositions avec l’étude de cas a permis de relever des éléments de réponses à la question posée et de formuler plusieurs recommandations abordant la légitimité de l’alliance entre caisses, la participation des dirigeants et du comité de coordination aux décisions stratégiques, l’implication des caisses et du CFE dans les activités conjointes, la prise en charge des besoins financiers des chefs d’entreprise, les problèmes bureaucratiques et techniques. Nos résultats semblent, de plus, nous démontrer que cette stratégie d’alliance entre caisses s’est avérée un succès à plusieurs égards. Enfin, outre la visée d’apporter des connaissances nouvelles sur ce qui nous apparaît être un cas particulier d’alliance dans le milieu coopératif, nous croyons que l’originalité de cette étude repose sur son cadre théorique. Bien que la compatibilité de l’approche des économies de la grandeur (Boltanski et Thévenot, 1991; Boltanski et Chiapello, 1999) et l’analyse stratégique (Crozier et Friedberg, 1977; Francfort et al, 1995) ait été démontrée par Amblard et al. (1996); cette recherche a permis de présenter de manière empirique cette compatibilité. Le cadre théorique ainsi articulé nous a semblé apporter une lecture différente de celle qui aurait été obtenue par une simple analyse de contenu en raison de l’utilisation des clés d’analyse : les compromis et les enjeux.

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