Les fils et la trame de l'aide sociale au Canada : 1990-2002

Cette thèse porte sur les transformations de l’intervention de l’État depuis les années 1980. On assiste, depuis une vingtaine d’années, à une transformation du rôle de l’État. De la mise en œuvre de politiques providentialistes, on est passé à l’adoption de politiques néolibérales. Ce passage s’est évidemment accompagné d’une transformation du discours étatique. Alors que l’État providence véhiculait des valeurs comme celle de la justice sociale, du progrès social et de l’égalité des chances, l’État néolibéral s’appuie sur des valeurs comme celles de l’efficacité, de l’équité, de l’inclusion sociale et de la compassion. En plus de cette transformation dans le discours, on constate l’apparition de nouveaux enjeux comme ceux de l’employabilité, de l’enfance. Ces derniers ont donné lieu à la mise en œuvre de politiques publiques liées à ces thèmes. Cette analyse se penche plus particulièrement sur les réformes des programmes de sécurité du revenu de quatre provinces canadiennes, le Québec, l’Ontario, la Saskatchewan et l’Alberta. Durant les années 1990, celles-ci ont toutes adopté des mesures conditionnelles dans leur programme d’aide sociale. L’introduction d’une contrepartie qui vise la réinsertion des prestataires de l’aide sociale sur le marché du travail représente un des indicateurs d’une transformation majeure de l’intervention de l’État dans le secteur de la sécurité du revenu. Cette mutation ne s’est cependant pas produite partout de la même manière. L’histoire institutionnelle, les rapports de forces entre les groupes sociaux ainsi que les partis politiques au pouvoir représentent autant de facteurs qui ont conduit les provinces de l’Ontario et de l’Alberta à adopter des programmes de workfare et celles du Québec et de la Saskatchewan à opter pour l’introduction de mesures incitatives. La mise en place de programmes de sécurité du revenu incluant une contrepartie différente dans les provinces canadiennes permet d’affirmer qu’il existe au moins deux régimes d’États d’investissement social : l’État d’investissement social de conciliation qui prend forme au Québec et en Saskatchewan et l’État d’investissement social répressif présent en Ontario et en Alberta.

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