Dans cette recherche, nous cherchons à comprendre comment les économistes – autant les idées (connaissances économiques) que les acteurs (experts et profession) – sont mobilisés dans le discours politique. Après une revue de littérature sur l’influence des économistes issue des travaux de la science politique et de la sociologie, nous interrogerons plus particulièrement l’impact de la crise de 2008 sur la profession. Ainsi, face à une expertise que plusieurs ont jugé discréditée par la crise financière, nous cherchons à comprendre si cette remise en question de la science économique (et des économistes) a modifié le rapport entre expertise économique et action publique. Nous appliquons notre démarche à un cas, soit l’étude de quatre débats parlementaires entourant les politiques fiscales au Québec. Cette analyse empirique vise donc à savoir laquelle des possibilités – remise en cause ou continuité dans l’utilisation de l’expertise économique par les acteurs politiques – est la plus près de la réalité observée.
Trois conclusions générales se dégagent de la recherche. Premièrement, les résultats de l’analyse de contenu tendent à confirmer que les connaissances et théories économiques mobilisées par les acteurs politiques sont généralement les mêmes avant et après 2008.
Deuxièmement, sur les types d’économistes, les résultats ne nous permettent pas de confirmer clairement un changement dans l’utilisation de cette expertise par les acteurs politiques. Si les arguments théoriques sont sensiblement semblables d’une période à l’autre, les acteurs politiques ne s’appuient toutefois pas exactement – ou de façon aussi prononcée – sur le même type d’économistes. Finalement, et surtout, la crise de 2008 n’a pas remis en question la légitimité de l’expertise économique. Pour chacun des débats, la validité des connaissances (théories des politiques fiscales) et de l’expertise économiques (types d’économistes) est tenue pour acquise par les acteurs politiques. En somme, malgré la responsabilité imputée aux économistes, la crise de 2008 a donc peu modifié le rapport qu’entretiennent les acteurs politiques avec cette expertise dans les débats parlementaires sur l’impôt au Québec.