Des communautés, isolées dans les recourbures de la Sierra Norte oaxaquénienne, au Mexique, misant sur un mode d’organisation traditionnel et sur les acquis de la réforme agraire, mettent sur pied des entreprises contrôlées par des assemblées générales d’usufruitiers de terres communales. Alors que la mondialisation, lorsque propulsée par les politiques néolibérales, rend orphelines plusieurs régions excentrées du globe, ces communautés font acte de résistance et proposent ainsi des contre-exemples.
Le présent mémoire rend compte de l’étude d’une de ces communautés ayant connu un des dénouements les plus heureux, celle de Capulálpam de Méndez. Depuis le début des années 1980, cette communauté s’est dotée de quatre entreprises communautaires œuvrant respectivement dans les secteurs de la sylviculture, de l’extraction de matériaux de surface, de l’écotourisme et de l’embouteillage d’eau. Ce mémoire vise à comprendre la spécificité des acteurs et des mécanismes qui permirent ce développement, notamment en dégageant la façon dont se sont encastrées, dans la communauté, les dynamiques sociales et économiques, de sorte à faciliter la satisfaction des besoins locaux. Notre démarche est basée sur l’analyse des interactions entre les cadres institutionnel et organisationnel de la communauté.
En définitive, ce mémoire démontre que la dotation de nouvelles capacités productives de Capulálpam de Méndez, toute relative soit-elle, ne s’est pas réalisée au détriment de l’équilibre environnemental ou du maintien du tissu social, ni d’une perte de contrôle local du politique. Ce mémoire expose également comment les mécanismes de reproduction sociale issus de la tradition ont permis un développement intégré de la communauté. Il fait aussi ressortir l’importance de la culture locale dans la détermination des objectifs de développement. Notre démarche montre que le développement s’inscrit dans une trajectoire historique où se cristallisent dans des institutions les stratégies passées, cristallisation qui circonscrit les nouvelles options à disposition. En ce sens, certains moments forts infléchissent le mouvement dans certaines directions. Ce mémoire démontre, en ce sens, que les moments de lutte forestière des années 1980 ont été, pour Capulálpam, foisonnants. C’est là que les acteurs du développement, principalement collectifs, se sont organisés et dotés en capacité. En plus d’expliquer comment les différents acteurs ont évolué dans leurs rôles et leurs demandes, nous identifions dans ce mémoire certains facteurs de réussite, comme la présence d’organisations régionales au grand pouvoir de réseautage ou la construction d’une identité locale riche, mais aussi certaines limites, comme la différenciation des rôles par le genre ou la présence d’une brèche dans la gouvernance locale au niveau de la gestion des ressources du sous-sol.