La création et l'utilisation collectives de connaissances dans les réussites techniques et économiques

Le contexte de l’économie du savoir soulève des questions de fond sur les liens entre la connaissance et la réussite technique et économique. Qu’est-ce que la connaissance ? Comment est-elle créée et utilisée dans les réussites techniques et économiques ? Comment rend-elle possibles ces réussites ? Dans la présente thèse, j’explore l’hypothèse que ces réussites reposent sur des processus de création et d’utilisation de connaissances collectifs et décentralisés. On retrouve de tels processus décentralisés dans les marchés, dans les communautés scientifiques ou techniciennes et dans les entreprises. La compréhension de ces processus pose le problème des compétences collectives décentralisées : comment un ensemble d’individus peut-il réussir à accomplir une tâche sans plan d’ensemble et sans direction centrale ? Les théoriciens de la gestion évoquent les processus d’ajustements mutuels en réponse à cette question, mais ces processus ont été peu étudiés et sont mal compris. La compréhension des réussites techniques et économiques passe par la compréhension des compétences collectives décentralisées et des processus d’ajustements mutuels. Les sciences de la cognition offrent un cadre conceptuel et méthodologique pour l’étude des compétences. Dans les sciences de la cognition, on explique les compétences sous la forme de machines de création et d’utilisation de connaissances. On comprend une machine lorsqu’on comprend la tâche qu’elle accomplit, les méthodes qu’elle utilise, et les processus qui mettent en action ces méthodes. Les sciences de la cognition ont développé des outils pour représenter, caractériser et comparer les tâches, les méthodes et les processus. J’appelle « approche sociocognitiviste » la démarche qui consiste à étudier les réussites collectives en s’inspirant de ce cadre. L’approche sociocognitiviste étudie le marché, la science et l’organisation sous la forme de machines complexes de création et d’utilisation de connaissances. J’essaie de caractériser la tâche accomplie par ces machines, les méthodes décentralisées utilisées et les processus d’interaction, d’échange et de coopération qui les réalisent. J’examine finalement la tâche d’innovation technicocommerciale et les machines sociales qui la réalisent. À l’aide d’une analyse documentaire, je caractérise la contribution de la communauté du génie logiciel à la réalisation d’une innovation technicocommerciale, et les moyens utilisés par Bell Canada pour mobiliser cette contribution.

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